La vie obstinée / Wallace Stegner

Suggestion : roman américain

Considéré par beaucoup comme le chef de file du mouvement littéraire américain “l’école du Montana”, auxquels se réfèrent la plupart des romans de Jim Harrison, ou Jon Krakauer, Wallace Stegner prend tout son temps (environ 150 pages) pour camper le décor et les personnages de ce récit. Il s’attache à dépeindre la nature environnante, la société qui peuple cette région de Californie (non loin de San Francisco) avant le développement même de l’action, qui sous l’apparence de faits quotidiens, se révèle aboutir à une tragédie.

Joe Allston, un homme âgé à la retraite (il était agent littéraire) s’est installé avec Ruth, son épouse, dans une maison assez isolée sur les hauteurs de la ville. Elle et lui passent une bonne partie de leur temps à élaborer un jardin, mais leurs efforts ne portent guère leurs fruits, leurs plantations étant sans cesse envahies par les nuisibles, des rongeurs (les tomomys), des plantes envahissantes (sumac vénéneux, concombres envahissants), des insectes piqueurs, des serpents et araignées venimeuses…

En promenade sur ses terres, Joe rencontre un jeune hippie nommé Peck, qui lui demande la permission de planter sa tente sur une extrémité de son terrain. Joe accepte mais bientôt, la cohabitation devient difficile car l’endroit attire les jeunes marginales et marginaux. Notre couple âgé fait aussi la connaissance de leurs nouveaux voisins et voisines les Catlin, une jeune famille venue s’installer dans une maison récemment acquise. Joe est un vieil homme ronchon, aigri et râleur… il a la critique facile et la conduite de ses voisin·es souvent le heurte, excepté celle de Marian et John Catlin et leur fillette Debbie. Il se brouille avec son entourage, personne ne trouvant grâce à ses yeux… (lecteurs et lectrices ignorent encore la cause de ses humeurs hostiles). Peu à peu, le récit s’installe, chacun·e livrant des pans de son histoire personnelle.

Nous sommes dans les années soixante, en plein dans la vague “retour à la nature”, mouvement hippie, drogues et liberté absolue. Les différences entre les générations sont très marquées… mais Joe et Ruth s’attachent à Marian, qui est enceinte et à John, son mari souvent éloigné pour son travail.

Sans l’ombre d’une trêve, Stegner mène son intrigue à son terme, analysant avec une finesse remarquable la psychologie de ses personnages si différents et pourtant si humains. C’est une vraie merveille d’écriture, bourrée d’humour ravageur… et si le personnage de Joe Allston vous réjouit, vous le retrouverez dans Vue cavalière, un roman postérieur de l’auteur.

(Colette)

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